L'affaire DULF : criminaliser la compassion en pleine crise des surdoses

L'affaire DULF : criminaliser la compassion en pleine crise des surdoses

Alors que le Canada traverse l’une des pires crises de surdoses de son histoire, le Drug User Liberation Front (DULF), un organisme communautaire de Vancouver, fait face à des accusations de trafic de substances.

Ses deux cofondateur·rice·s, Eris Nyx et Jeremy Kalicum, risquent une condamnation pour avoir mis sur pied un club de compassion de distribution sécuritaire de substances, une initiative qui visait pourtant à sauver des vies.

Le procès, qui s’est terminé à la mi-octobre, a été suivi par de nombreuses personnes militantes, observateur·rice·s et expert·e·s en santé publique. Le verdict sera rendu le 7 novembre 2025 par la juge Catherine Murray de la Cour suprême de la Colombie-Britannique.

Appuyez DULF dans sa défense juridique

De gauche à droite : les avocats Stephanie Dickson et Tim Dickson, Jeremy Kalicum et Eris Nyx. Photo : Dustin Godfrey.


Un service essentiel poursuivi au lieu d’être soutenu

Le DULF avait obtenu en 2021 une exemption partielle du Controlled Drugs and Substances Act (CDSA) de Santé Canada, lui permettant de posséder certaines substances à des fins de santé publique. Malgré cela, le gouvernement fédéral a refusé de lui accorder une exemption complète couvrant l’approvisionnement et la distribution, deux éléments pourtant essentiels à la mise en œuvre d’un approvisionnement sécuritaire (safe supply).

Le 25 octobre 2023, la police de Vancouver a mené une descente dans les locaux de DULF et arrêté les deux responsables, alors qu’aucune distribution de substances n’était en cours. Ce revirement a surpris d’autant plus que les forces policières avaient auparavant reconnu le bien-fondé du projet et salué le travail de l’organisme.

Depuis la fermeture du club de compassion du DULF, au moins deux de ses 47 membres sont décédé·es. Pendant son année d’opération, le DULF n’avait recensé aucun décès, et les surdoses nécessitant de la naloxone avaient diminué des deux tiers chez les membres.

Image tirée de la campagne de dons du DULF, visant à recueillir de l’aide pour couvrir les frais de justice liés au procès. Source : cagnotte Zeffy du DULF.


Une juge critique envers la poursuite

Selon les propos rapportés par Drug Data Decoded, la juge Murray a remis en question la cohérence du dossier de la Couronne, soulignant que « tout le monde savait ce qui se passait » et que les deux accusé·es semblaient être « laissé·es pour compte » à la suite de pressions politiques.

Elle a aussi noté l’incohérence du cadre légal : Santé Canada a exempté DULF de posséder des substances, tout en lui interdisant de les obtenir et de les distribuer, rendant toute action concrète impossible.

Données recueillies et analysées par le Drug User Liberation Front (DULF) après une année d’opération de son club de compassion d’héroïne, de cocaïne et de méthamphétamine.
Source : DULF (@DULFBC), 20 septembre 2023.


Une affaire symbolique pour la décriminalisation et la santé publique

Cette affaire dépasse largement le sort individuel d’Eris Nyx et de Jeremy Kalicum. Elle met en lumière les contradictions du système actuel de prohibition, alors que les décès liés aux surdoses explosent à travers le pays.

Garth Mullins, s’est exprimé auprès de Drug Data Decoded à propos du procès : (traduction libre)

« Ce procès représente un moment très important pour nous toute·s. Pendant que deux de nos leaders courageux·ses sont jugé·es, c’est en réalité tout l’appareil de la prohibition qui devrait être sur le banc des accusés.
La guerre contre la drogue et tous les politicien·ne·s et décideur·euse·s qui la maintiennent a du sang sur les mains : le sang de nos ami·e·s, de nos proches et de nos familles.
On accuse Eris et Jeremy de possession en vue de trafic, mais moi, j’accuse l’État de meurtre social, de nécropolitique. »

Si DULF est reconnu coupable, l’organisme prévoit de contester la constitutionnalité de la loi canadienne sur les substances. Un verdict favorable pourrait donc marquer un tournant historique pour la politique sur les substances au Canada.

Soutenir DULF, c’est défendre la vie

Face à ce procès injuste et au manque criant de soutien gouvernemental, DULF a besoin de la solidarité du public. Vous pouvez soutenir leur fonds juridique pour contribuer à leur défense et à la poursuite de leur mission : sauver des vies.

Faites un don via Zeffy   

Faites un don via E-Transfers ou PayPal:
Send funds to: druguserliberationfront@gmail.com


Source principale : Everyone knew what was happening,” judge admonishes Crown as DULF awaits trafficking verdict , Drug Data Decoded (Euan Thomson, 2025)

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